Travaux: droits, obligations et conseils pratiques

23.08.2023

Les bailleurs/bailleresses qui envisagent d’entreprendre des travaux de rénovation et de transformation sur un bien locatif sont souvent confrontés à une multitude de défis. Les travaux envisagés peuvent non seulement perturber le quotidien des locataires, mais aussi soulever des questions juridiques. Nous t’expliquons ici tes droits et obligations.

Travaux: droits, obligations et conseils pratiques

La rénovation d’un bien immobilier implique une planification soutenue et beaucoup d’efforts. En tant que bailleur/bailleresse, il est essentiel que tu saches quels aspects juridiques te sont applicables et surtout que tu les respectes. Notre article devrait t’aider à garder une vue d’ensemble.

Définition de la notion de «bien loué»

Tout d’abord, il est important de comprendre les termes. Parmi la foultitude de contrats de location, on tombe souvent sur des termes tels que «bien loué» ou «bien». Mais que cela signifie-t-il exactement?

Dans le droit locatif suisse, on entend généralement par «bien loué» la partie physique du bien immobilier que le bailleur ou labailleresse loue à un-e locataire. Il peut s’agir d’un appartement, d’une maison, d’un local commercial, d’un garage voire d’une place de stationnement. Cela comprend tous les éléments fixes tels que les sols, les murs, les plafonds, les portes, les fenêtres, les installations sanitaires ainsi que les équipements de la cuisine.

Conformément à l’art. 253, al. 1 CO, tu dois, en tant que bailleur/bailleresse, remettre le bien loué à tes locataires dans un état approprié à l’usage prévu. En outre, tu dois conserver le bien en l’état pendant toute la durée du bail. Cela signifie que tu es responsable de l’entretien et des réparations du bien loué afin de garantir son bon usage.

Note bien que le bien loué ne se limite pas aux espaces intérieurs. Les espaces extérieurs tels que les balcons, les terrasses ou les espaces communs comme les escaliers, les halls d’entrée, les buanderies et les jardins peuvent également être considérés comme faisant partie du bien loué s’ils sont clairement définis comme tels dans le contrat de location.

Ce faisant, il t’incombe non seulement de réparer les défauts et dommages susceptibles de nuire à l’usage du bien loué, mais aussi de veiller à ce que celui-ci reste en bon état habitable.

Distinction entre «Travaux d’entretien» et «Rénovations et modifications»

Pour les bailleurs/bailleresses, il est important de faire la distinction entre les «travaux d’entretien», d’une part, et les «rénovations ou modifications», d’autre part. Les deux peuvent être nécessaires pour maintenir la qualité et l’attractivité de ton bien locatif, mais ils ont des conséquences différentes sur tes droits et obligations ainsi que sur ceux de tes locataires.

Les travaux d’entretien sont des tâches qui doivent être accomplies pour préserver l’état du bien immobilier et en éliminer les défauts. En tant que bailleur/bailleresse, tu es tenu-e, conformément à l’art. 256 du Code suisse des obligations, de maintenir tes biens loués dans un état approprié à l’usage prévu. Par conséquent, tu dois remédier à tous les défauts susceptibles d’entraver cet usage. Ces travaux comprennent les réparations, tâches de maintenance et autres améliorations mineures. Les points suivants entrent par exemple dans ce domaine:

  • Réparation de la rampe d’escalier
  • Remplacement d’un réfrigérateur défectueux
  • Réparation des joints dans la salle de bains

En revanche, les rénovations et les modifications sont des tâches qui dépassent la maintenance normale. Ils servent à améliorer le bien immobilier, à accroître le confort de l’habitation voire à augmenter sa valeur marchande. En règle générale, ces travaux ne sont pas obligatoires et sont laissés à la libre appréciation du bailleur ou de la bailleresse. Il peut s’agir de modifications de la structure du bâtiment, de rénovations majeures ou de l’aménagement de nouvelles installations, telles que:

  • L’installation de son propre étendoir à linge en tour dans le logement
  • L’aménagement du balcon
  • Une rénovation complète de la salle de bains

Alors que les travaux d’entretien n’ont souvent aucune incidence sur le loyer, les rénovations et les modifications au sens de l’art. 269a, al. 1 CO peuvent être invoquées pour justifier une augmentation de loyer, dans la mesure où elles présentent un avantage durable pour les locataires et contribuent à améliorer leurs conditions de vie.

Il est important, toutefois, d’informer les locataires à temps (idéalement trois mois à l’avance) des rénovations et modifications prévues, et d’obtenir leur accord, notamment si les mesures prévues sont susceptibles d’entraîner d’importantes perturbations. Les locataires ont le droit de s’opposer à une augmentation de loyer en raison de rénovations et de modifications dans un délai de 30 jours à compter de la notification.

Caractère acceptable des travaux pour le ou la locataire

Le droit locatif prévoit une multitude de scénarios dans lesquels les bailleurs/bailleresses doivent ou peuvent effectuer des modifications structurelles ou des travaux de rénovation. Bien que ces travaux soient souvent nécessaires, ils peuvent avoir des conséquences majeures pour le ou la locataire. Mais alors, à partir de quel moment de tels travaux sont-ils considérés comme acceptables?

La réponse dépend de plusieurs facteurs devant être examinés individuellement. Le droit locatif suisse fixe à cet effet certains critères et conditions qui doivent être pris en compte afin de déterminer l’acceptabilité des travaux par le ou la locataire. Conformément à l’art. 259 al. 2 CO, tu ne peux, en tant que bailleur/bailleresse, effectuer que des travaux pouvant être raisonnablement exigés du ou de la locataire pendant la durée du bail. 

À cet égard, la durée et l’étendue de ces travaux sont des facteurs particulièrement importants. Les petites réparations achevées en un jour et ne dérangeant que très peu le ou la locataire sont généralement acceptables. En revanche, les travaux longs et gênants qui durent des semaines voire des mois peuvent être intolérables, surtout s’ils limitent considérablement l’utilisation du bien loué ou nuisent aux locataires. En voici quelques exemples:

Sont raisonnablement exigibles:

  • Les modestes réparations dans la salle de bains ou la cuisine qui ne prennent que quelques heures.
  • Les travaux de peinture dans les parties communes du bâtiment effectués pendant les heures normales de travail.
  • Les travaux d’entretien réguliers sur les installations de chauffage et de ventilation, annoncés à l’avance et dont l’intervention ne nécessite pas toute une journée.

Ne peuvent être raisonnablement exigés:

  • Les travaux de rénovation importants qui rendent impossible l’utilisation de l’ensemble du logement sur une période prolongée.
  • Les travaux non annoncés ou annoncés à la dernière minute qui dérangent les locataires pendant leur temps libre ou pendant les heures de télétravail.
  • Les travaux qui bloquent l’accès à des installations importantes telles que la salle de bains ou la cuisine pendant plusieurs jours.

Comme nous l’avons mentionné précédemment, il est important d’informer suffisamment tôt le ou la locataire de la nature, de l’étendue et de la durée probable des travaux. En tant que bailleur/bailleresse, tu dois également accorder une réduction de loyer appropriée si nécessaire.

La détermination de l’acceptabilité des travaux pour le ou la locataire est complexe et nécessite un examen minutieux des circonstances individuelles. En cas de doute, nous te conseillons de t’adresser à un-e spécialiste ou à un service de conseil.

Mesures d’accompagnement possibles

Il existe toute une série de mesures qui peuvent contribuer à minimiser l’impact des travaux de rénovation.

Tu peux notamment prévoir des périodes calmes, autrement dit des périodes pendant lesquelles aucune tâche ne sera accomplie pour permettre à la ou au locataire de bénéficier de plages horaires sans bruit ni dérangement. Tu peux convenir individuellement de ces périodes de repos avec les locataires afin de les adapter à leurs horaires et besoins.

Une autre solution consiste à proposer des alternatives temporaires lorsque certaines parties du bien immobilier ne peuvent être utilisées en raison des travaux. Par exemple, tu pourrais mettre à disposition un poste de travail de remplacement si la zone de travail principale du locataire est concernée, ou suggérer d’autres possibilités de stationnement si le parking est en cours de rénovation.

Une bonne communication est ici décisive. Informe régulièrement le ou la locataire de l’avancement des travaux et offre-lui la possibilité de poser des questions ou d’exprimer ses doutes. Dans de nombreux cas, les problèmes et les malentendus peuvent être évités si les locataires ont le sentiment que leurs besoins sont pris en compte et qu’ils sont associés au processus de décision.

Prétentions financières de la ou du locataire

Les locataires ont droit à une réduction de loyer si l’utilisation du bien loué est considérablement entravée par des travaux de rénovation. C’est notamment le cas lorsque certains équipements ou pièces, telles que la cuisine ou la salle de bains, sont inutilisables, ne serait-ce que de manière limitée pendant les travaux. Le montant de la réduction de loyer dépend de la gravité et de la durée du préjudice et doit être proportionnel à la restriction de l’utilisation de la surface locative.

En plus d’une réduction de loyer, les locataires peuvent également demander des dommages et intérêts dans certaines circonstances, notamment si les travaux les ont obligés à rechercher d’autres hébergements ayant entraîné des frais supplémentaires. Les éventuels dommages causés à la propriété personnelle de la ou du locataire par les travaux peuvent également faire l’objet d’une demande de dommages et intérêts.

Toutefois, le droit à une réduction de loyer ou à des dommages et intérêts n’est pas automatique. Celui-ci dépend des circonstances précises de chaque cas et doit, dans l’idéal, être évalué avec le concours d’un-e expert-e juridique.

Recommandations et conclusion

En résumé, nous avons rassemblé ici quelques recommandations pour les bailleurs/bailleresses sur le thème des travaux de rénovation/d’assainissement:

  1. Une communication ouverte: informe tes locataires en temps utile et de manière transparente des travaux envisagés. Explique-leur les raisons, l’étendue des travaux et leur durée prévue.
  2. Tiens compte des besoins des locataires: planifie les travaux de sorte à ce qu’ils les dérangent le moins possible. Fixe par exemple des temps de repos et efforce-toi d’effectuer les travaux en dehors des périodes d’utilisation principales du bien immobilier.
  3. Équité et respect: respecte les droits des locataires et traite-les équitablement. Si les travaux causent d’importantes perturbations, prévois une réduction de loyer appropriée et propose des alternatives, si nécessaire.
  4. Assistance juridique: en cas de doutes, n’hésite pas à solliciter un conseil juridique pour t’assurer de la bonne gestion des aspects légaux.
  5. Travail de qualité: veille à ce que les travaux réalisés soient de bonne qualité afin d’éviter de futurs dérangements et d’augmenter la valeur du bien immobilier.

Enfin, tu dois toujours, en tant que bailleur/bailleresse, t’efforcer de trouver un équilibre entre la nécessité de préserver et d’améliorer ton bien, et celle de respecter les droits et le bien-être de tes locataires. Avec une bonne planification, une communication ouverte et le respect de toutes les parties prenantes, la réalisation de travaux de rénovation et de transformation peut devenir une situation gagnant-gagnant pour chacune des parties concernées.